17, deux varans de l'ouest africain, sauvés des filets

 Un varan de l'ouest africain emmailloté dans un filet de nylon, marigot du Djeuss
2010 12 17 aprem' / © Photo par Abdoulaye S. pour Ornithondar

* Bango. Marigot de Djeuss, coté saumâtre -

APREM'-


Vendredi, jour de la grande prière. A 15h, le village et les rives du Djeuss sont déserts. Au pied des mangroves, sur la vase légèrement dégagée par la marée, un gigantesque filet accroché aux racines des palétuviers obstrue tout passage. Un jeune varan de l'ouest africain (varanus stellatus, West Africa Nile monitor) s'est empêtré dans les mailles de nylon vert qui traînent négligemment au sol; j'envoie le jeune Abdoulaye, qui réquisitionne un petit piroguier, pour sauver le saurien avant que la marée montante ne finisse par l'affoler et le noyer. Malgré les redoutables coups de queue du saurien, comme un fouet, les enfants arrivent à déchirer une partie du piège et libérer ainsi l'animal, passablement fatigué par des heures de lutte vaine. Un peu plus loin, un second varan, beaucoup plus coriace, parvient à s'extraire du filet mortel par lui-même.


Ci-dessus: 
sauvetage d'un jeune varan de l'ouest africain piégé par un filet traînant  
2010 12 17 aprem' © Photos par Abdoulaye S. pour Ornithondar


Nota *2: malheureusement, ce genre d'accident est très fréquent, dans le delta. La chance des deux varans, ce jour, c'est que le piège s'était refermé sur eux juste en face de mon balcon sur le Djeuss, et que mes jumelles restent par tous les temps vigilantes... Ce reptile est pourtant totémique, à Bango, et tout au long du Djeuss aval. Dès que l'on quitte les rivages pêcheurs, le varan d'eau redevient, comme partout en Afrique noire, le mets de choix dont tout le monde raffole ! Demandez un peu aux habitants de Ngallèle ou de Maka Toubé, sur les bords de la grande sebkha de khor !... Et, avec l'exode rural et l'immigration coranique des Guinéens grands amateurs de chair reptilienne, les sollicitations se font de plus en plus pressantes, comme pour les phacochères impies... A l'évidence, la croyance protectrice des bords du Djeuss confine de plus en plus à l'indifférence... Car Dieu est aussi entré dans les esprits: si l'animal, qu'on ne mange pas ici, meurt dans les mailles d'un filet fonctionnel ou abandonné à la nature, ce sera la faute-à-pas-de-chance, c'est à dire qu'Allah l'aura voulu. Le fatalisme et le sourire condescendant des riverains, quand j'évoque les varans sacrés qui meurent dans leurs filets, en disent long pour la suite *1.

*1 Les religions monothéistes, ici l'Islam, ailleurs le Christianisme, éradiquent toutes les croyances, mythes et coutumes d'antan, les plus mauvaises mais aussi les meilleures. Même celles qui jadis permettaient de gérer ou protéger intelligemment les 'richesses' de la nature. Pendant ce temps, à l'occasion du 3e Festival mondial des Arts nègres (Fesman), de doctes penseurs urbains parlent de "renaissance" africaine - comme la clique universitaire qui entoure Gbagbo emmenant la Côte d'Ivoire au bord du gouffre ?-, invoquant Césaire pour marteler la nécessité de "redevenir soi-même". Encore faudrait-il savoir ce que cela veut dire, "redevenir soi-même", quand tout est fait, sans même l'aide des affreux d'outre mers, pour décérébrer les masses manipulées et maintenues dans les vaporeuses lobotomisations. Pour le profit des escrocs qui pullulent plus que jamais, eux, en ce triste siècle suicidaire. Quant aux universitaires pétris de diplômes et leurs amis fonctionnaires du club francophone, et tous les ronds-de-cuir adeptes de séminaires oniriques avec perdiems cyniques, on ne les voit guère sur le terrain, ceux-là ! Ceux-là ont dépassé le niveau de mettre les mains et les pieds dans la terre, probablement !? Plongés dans les livres, alors ? 
*2 Voir aussi sur OrnithondarUn énooooorme varan qui s'affole !, 2010 12 11

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